Taman Negara

(GMT +7)

A peine arrivés à Kuala Tahan, le village le plus à l’intérieur du Taman Negara (littéralement : parc national), nous sommes impressionnés par cette forêt immense.

Subjugués par cette merveille, nous tenons absolument à nous « perdre » en profondeur dans ce paysage de légende.
Nous ne voulons pas faire le trek proposé par les agences (oui, nous en voulons toujours plus) nous voulons sortir des sentiers battus, aller là où aucun guide local ne veut (ou ne peut) nous emmener! Les malais ont beaucoup de croyances et ne s’aventurent jamais en dehors des sentiers balisés.

Nous prenons alors contact avec un véritable Orang Asli, un « homme de la terre » (les orangs outans étant les « hommes des arbres »), seul ces gens là peuvent nous emmener au centre de la forêt.
Les Orang Asli sont des tribus nomades qui vivent au centre de la jungle et en symbiose avec elle.
Aswan est un jeune homme très souriant de 31 ans (mais il paraît si jeune que nous nous demandons au départ s’il n’a pas dit 13 ans)! Il a grandit dans la jungle et en connaît les moindre recoins, c’est son « terrain de jeu ».
Il n’est pas vêtu de feuilles, il porte un short (comme nous) mais se balade quand même dans la jungle avec une aisance surprenante et de petites sandales en plastiques (quand ce n’est pas à pieds nus).
Cette fois nous nous demandons quand même où nous nous embarquons…

Nous prenons une petite barque conduite par notre guide aborigène et filons sur le fleuve pour nous perdre dans la jungle, la grande, la vraie.
Cette forêt a plus de 130 millions d’années. C’est la plus vieille du monde. A côté d’elle, l’Amazonie passe pour un nourrisson!

Nous pénétrons enfin au coeur de ce paysage spectaculaire. Ici le climat est stable. La température est d’environ 30°C toute l’année et le taux d’humidité avoisine les 90% constamment  Notre trek se déroule donc dans un hammam géant et nous sommes « en nage » après quelques pas seulement (heureusement que les rivières nous offrent quotidiennement l’occasion de bains frais et agréables).

L’intérieur de la jungle est extrêmement dense et extraordinairement sombre ce qui renforce encore cette atmosphère fantastique et surnaturelle.
Dans cette forêt, tout est plus grand. Les arbres font 80 mètre de hauts, les feuilles peuvent faire jusqu’à un mètre de diamètre, les scarabées sont colorés et gigantesques, ce que nous prenons pour des mouches (appelés jungle orchestra) mesurent 10 cm de long (et « chantent » (ou crient) lorsqu’on les attrape  et même les simples fourmis mesure 2 à 3 cm!

Nous faisons tout de suite la rencontre des sangsues. Ces « charmantes » petites bêtes se collent aux semelles de nos chaussures, grimpent le long de nos chaussettes et s’aplatissent spectaculairement pour y entrer jusqu’à trouver une petite parcelle de peau « à croquer ». De plus, elles vous injectent un anti-coagulent de sorte que, si vous arrivez à les enlever, la plaie ne se referme que très mal.
Une fois aplaties sous vos chaussures, elles ne vous quittent plus, nous n’avions jamais si bien compris l’expression « coller comme une sangsue »!
Mo les aime beaucoup, et elles le lui rendent bien…

Il y a des plantes particulières, des champignons aux formes rigolotes ou des buissons aux feuilles bleues qui deviennent rouges pendant la nuit. Parfois un arbre gigantesque tombe et ouvre une brèche dans cette forêt si dense. Les Orang Asli les utilisent comme pont.

Et puis il y a les bruits de la jungle. La forêt ici est loin d’être calme, elle est même extrêmement sonore! Nous reconnaissons clairement les enregistrements des musées (ou autre papillorama) que nous avons entendus dans nos enfances. Mais nous découvrons, surpris, que ce sont, pour la plupart des bruits d’insectes et non des bruits d’oiseaux!
A la tombée de la nuit cela devient encore plus impressionnant, voir presque irréel tant les sons s’intensifient!
Puis, après le crépuscule, les bruits changent. Certains s’endorment, d’autres se réveillent…
Le ballet des lucioles (et autres chenilles lumineuses) s’enclenchent et donnent à notre campement un aspect féerique.
Aswan nous fait un feu et nous prenons conscience de l’endroit extraordinaire où nous allons passer la nuit!

Plus les jours avancent et plus nous nous enfonçons dans les entrailles de ce gigantesque organisme vivant.
Nous apprenons à connaître notre guide. Etant Orang Asli, il n’est jamais allé à l’école et ne parle que quelques mots d’anglais mais nous sommes passés « maître dans l’art de la communication par les gestes » et nous nous comprenons (le plus souvent) très bien. Il nous fait quand même beaucoup rire, le jour où, parlant d’une grotte il nous dit qu’il y a beaucoup de « Batman » dedans!
Il nous explique qu’il fait partie de la tribus des Bathèk (il reste 750 Bathèk en Malaisie péninsulaire. Selon certains chercheurs, l’origine de leur population remonterait aux premières vagues de peuplement à partir de l’Afrique il y a plus de 50 000 ans).
Aswan adore pêcher, alors il nous explique ses techniques (incroyables) de pêche. Mais il nous enseigne également comment se soigner en forêt.
Il rigole beaucoup lorsqu’il s’aperçoit que nous portons dans nos sacs des quantités de bouteilles d’eau potable. Il nous explique qu’un Orang Asli n’a besoin de rien d’autre que de sa machette pour survivre dans la jungle et nous montre comment trouver de l’eau potable. Nous nous prenons alors au jeu et buvons l’eau (très bonne d’ailleurs) des lianes.

Nous faisons moins les malins par contre, lorsque nous nous retrouvons à un mètre à peine d’un immense serpent noir (et que notre guide nous dit qu’il est dangereux). Il doit mesurer plus d’un mètre cinquante de long et se déplace à une vitesse impressionnante.
Nous préférons observer les familles de singes qui grimpent au sommet des arbres avec une agilité extraordinaire, écouter les cris des orangs outans, admirer le vol des calaos aux dessus cimes ou chercher les différences entre les cerfs de la jungle et ceux de chez nous (ceux de la jungle ont les bois poilu et de petites canines qui leur donnent un air d’animal préhistorique)!
Nous croisons deux campement de tribus au centre de la forêt et sommes vraiment impressionnés.

Nous ne voyons (heureusement) pas de tigre (Aswan nous explique qu’il sont très peureux et qu’il en voit rarement, mais qu’il en a entendu un le mois dernier), ni d’ours, ni d’éléphants (mais nous voyons leurs traces qui datent, selon notre guide, d’il y a trois jours).

Les connaissances d’Aswan sont impressionnantes. Il connait non seulement chaque plante et chaque arbre de la forêt, nous explique lesquels utiliser pour construire une sarbacane, comment trouver de la colle, du « papier ponce » (une feuille très solide et rugueuse),…
Mais il sait également reconnaître chaque sons d’animaux, nous dire où ils sont, de quel taille et combien sans même avoir à lever les yeux!
Lorsqu’il marche, il ne fait aucun bruit (nous avons parfois l’impression d’être des éléphants à côté de lui), seul le bruit de sa machette qui claque lorsqu’il nous ouvre le passage retentit.
Nous remarquons qu’il plie une feuille ou une autre (toujours de la même espèce). Il nous explique que c’est sa manière d’informer sa tribu qu’il est passé par là (chaque membre possède une espèce de plante spécifique et ils les utilisent pour communiquer).

Nous avons beaucoup de respect pour ce petit homme qui nous raconte qu’il adore son métier mais que le plus dur dans son examen (car même les Orang Asli ont un diplôme pour emmener les touristes) était de le payer…

…Cette expérience restera gravée très longtemps dans nos mémoires…

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